Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 18 avril 2007

ÉCRIRE, TÉLÉPHONER

medium_Untitled-3.jpgChez Marie-Paule Belle, les lettres d’amour, on n’y répond pas, elles se perdent, elles sont mises au rebut. Pas de chance. Il y a des grèves et l’on n’ose pas envoyer des télégrammes. Ce n’est pas facile… Encore ne s’agit-il là que d’un aspect de l’incommunicabilité. Incompréhension de l’amour, dans l’amour : « Si tu recevais du papier bleu qu’en dirais-tu / Que je fais toujours des drames ». On n’ose pas, on avance sur la pointe de la plume : « Mais ma lettre a su rester discrète / Si toutes les lettres s’interprètent / (…) J’espère un jour que tu comprendras ». On espère – dans les deux sens du mot – toujours ; on espère parce qu’on n’ose guère faire plus. Parfois, c’est affreux : « La lettre d’amour que l’on jette aux ordures ». Comment communiquer ? Il y a le téléphone, mais on aboutit à un répondeur et « Pour tout l’amour du monde / On n’a que trent’ secondes ». On appelle, on rappelle, on s’appelle, on se rate, on ne se retrouve pas : « J’t’adore, message terminé ». C’est triste et « On a beau croiser nos voix sur les fils électriques / Y a pas d’étincelle » puisqu’il faut « En dix s’cond’s se dir’ tout / Attention c’est à vous / Enregistrer sa vie / Cri d’amour dernier cri / Mêm’ le répondeur est / Occupé… occupé… occupé ». Enfin, il y a des fois où l’on utilise les cabines publiques quand la boîte aux lettres reste désespérément vide : « Je n’ai pas le téléphone / Et tu ne m’écris jamais ». Alors, bien sûr « Je descends pour t’appeler » mais peut-être aurait-il mieux valu ne pas le faire : « Et dans la cabine en verre / Tu me dis que c’est fini / Qu’on peut rester bons amis / Que c’est pas la guerre ».

Pas gai, n’est-ce pas ? Eh oui, ça change de La Parisienne, de Wolfgang et moi ou de Nosferatu, de L’œuf ou du Menu. On ferait bien de prêter attention à ces chansons, tout de même. On ferait bien, aussi, de relever combien les chansons de Marie-Paule Belle sont révélatrices de l’époque où elles furent écrites : il y a là un temps où l’on s’écrivait encore par la poste, où les premiers répondeurs apparaissaient et où l’on se croyait tenu de préciser que le message était terminé, où l’on n’avait pas le téléphone chez soi et où l’on devait aller jusqu’à la cabine du bout de la rue, et faire la queue puisqu’elle était forcément occupée.

Cela ne signifie nullement que ces chansons soient datées. D’ailleurs, qu’est-ce que ça veut dire, ce mot ? Nous sommes tous datés. Nous sommes oblitérés comme des timbres-poste. Nous portons un cachet comme une trace chiffrée, lisible. Au contraire, ce sont d’excellentes chansons qui témoignent de leur temps, ce qui est la meilleure manière de s’inscrire dans notre imaginaire, le plus sûr moyen, même si c’est paradoxal, de durer.

(Photo Marc Attali)

16:35 Publié dans Gloses | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

Plutôt une question : Est-ce Marie-Paule Belle qui chante une chanson qui va comme ceci (c'est vague dans mon souvenir) :«Comme tu m'as conquise, dans les rues de Venise, Venise sous la neige...Comme tu m'as séduite, les rues étaient petites, Venise prise au piège...»

merci!

Écrit par : Liliane Benoit | jeudi, 26 avril 2007

Euh... Pas à ma connaissance, à moins qu'il ne s'agisse d'une chanson d'un ou d'une autre, comme elle en a interprétées quelques unes dans des disques collectifs, mais je ne crois pas. J'ai pensé un moment à Il pleut sur Venise que chante Cora Vaucaire mais je viens de la réécouter et ce n'est pas ça. Je regrette de ne pouvoir être plus précis. Peut-être cela dira-t-il quelque chose à d'autres participants ?

Écrit par : Jacques Layani | jeudi, 26 avril 2007

Les commentaires sont fermés.